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Le Covid est en moi

Au mois de novembre 2019 (la date est encore discutée), un chinois travaille au marché de Wuhan. Il ne sait pas que son destin va changer celui du monde... (Je choisis cette version-là et pas l'hypothèse certes rigolote d'un chercheur gaffeur qui aurait oublié de fermer la porte de son laboratoire hautement sécurisé, car ce serait pas sérieux hein...).

Il prépare les produits sur son étal du jour. Tout est si gourmand... Pangolin, louveteau, serpent, rat vivant ? Que du bon, du local, du bio.

Ce marchand est sans doute content de sa journée. Il repart le soir chez lui avec plein de yuans en poche, mais ne se doute pas qu'il n'est plus seul : il ramène en effet, sans pouvoir l’imaginer une seconde, un petit passager clandestin opportuniste et redoutable…

Coronavirus, covid-19. Oui c'est bien lui. On ne va pas refaire toute l'histoire de la pandémie, et je vous la fais en « avance rapide » : le virus, très contagieux, se répand d'abord très rapidement en silence parmi quelques travailleurs du marché de Wuhan. Puis le virus se multiplie, se répand partout. Il mute, accélère, fait plusieurs fois le tour de la planète, contamine des millions de gens.

265 millions de personnes sont infectées. Et moi et moi et moi.

Oui car le covid est en moi ! Depuis bientôt 10 jours. Combien de transmissions ont été faites depuis ce premier cas de ce marchand chinois jusqu'à ma petite personne ? Je ne sais pas.

Mais je connais la personne qui m'a transmis en dernier le virus : c'est ma femme ! Qui elle même l'aurait peut-être attrapé au spectacle de la Revue...

Qui m'a contaminé ainsi que notre petit-fils. Qui du haut de ses 6 mois l'a refilé à mon fils et sa femme. Voilà comment très concrètement on crée un petit cluster familial en deux temps trois mouvements !

Vaccinés ? Tous, oui bien sûr.

Échec de la vaccination : ben c'est sûr, on a d'abord été surpris de constater que cela n'a empêché personne d'être infecté et de transmettre. La totale.

Mais les symptômes ? Rien ou presque. En temps normal on n’aurait rien fait, on n’aurait rien su. J'ai des rhumes plus conséquents chaque année.

Donc relativisons l'échec de la vaccination : si le vaccin a comme seul but d'empêcher d'être malade alors oui c'est un immense succès ! Surtout si je fais la comparaison des premières vagues qui avaient attaqué durement des personnes proches et qui n'avaient pas la chance à l'époque d'avoir un vaccin comme moyen de défense. Rien à voir : ils étaient, eux, vraiment malades.

Me voilà considéré comme malade, avec 10 jours de vacances obligatoires, mais je n'ai qu'un tout petit rhume. Et un rhume, sauf si on s'appelle Benoît Brisefer (pour les connaisseurs), ne pose pas de problèmes insurmontables.

Par contre gérer un magasin de cycles, alors que les deux chefs sont à l'isolement, et qu'un mécanicien en parallèle manque aussi pour les mêmes raisons, c'est plus embêtant.

En relisant mes quelques blogs, je vous avais laissé, en 2020, sur un rebond de notre commerce après une période d'incertitudes : qu'allait devenir notre commerce de vélos dans ce monde économique devenu moins linéaire, plus « stop and go », moins prévisible ?

Ben on va bien, très bien, merci !

On a beaucoup de chance : celle d'être au bon moment avec les bons produits au bon endroit. La demande a explosé. Littéralement. Fois deux, en deux ans. Du jamais vu, du jamais espéré.

Tout n'est pas simple, les pénuries sont là, et on a dû s'habituer à d'autres pratiques très rapidement, comme celles de devoir commander des années à l'avance. Ou celles de devoir accepter qu'on nous refuse des achats, par manque de vélos. Ou celles de devoir accepter des quotas imposés, avec des vélos obligatoires. C'est à prendre ou à laisser !

Les magasins ont gagné des ventes, des clients. Mais les marques de vélos ont parfois paradoxalement perdu de l'argent. Pas assez de pièces détachées, pas assez de production, pas assez donc de livraison. Du coup les prix montent. Et nous nous adaptons. En permanence.

On a agrandi l'atelier, de manière conséquente, en annexant l'arcade voisine. On a embauché, passant de 4 à 8 personnes. On a appris à gérer un site, à multiplier les créneaux de vente.

Passionnant. Fatiguant mais intense.

Le Covid s'est décidé, après un long périple, à faire escale dans un marchand de vélos. J'espère qu'il n'a pas pu aller plus loin, que je n'ai pas été un pont, mais une impasse. Pourtant je lui dois objectivement beaucoup à ce virus. S'il n'avait engendré tant de drames, je lui ferais des bisous, je lui aurais offert un avenir, en infectant un concurrent par exemple...

Mais tout de même, je suis heureux qu'il trépasse en moi : et ce sera le cas bientôt, car selon le médecin cantonal, je ne serai plus contagieux à partir de minuit !

Peut-être un jour, il reviendra en moi, renommé en variant de je ne sais quelle lettre grecque. Ou plutôt vraisemblablement avec un autre alphabet car on va bien finir par arriver à la dernière, tôt ou tard.

Ce qui me plairait : un variant qui aurait pris définitivement le dessus sur tous les autres variants, car extraordinairement contagieux, mais totalement inoffensif.

Symptôme principal : il donnera le sourire, la banane ! On s'embrassera, on se touchera, on se prendra dans les bras, pour s'infecter dans des fêtes débridées. Il permettra alors une immunité naturelle, 100% efficace et surtout définitive.

Ce qui me plairait aussi : un variant hawaïen. Surfeur. Baptisé au nom d'une lettre de l'alphabet hawaïen : pourquoi pas le variant  'Okina, qui est une consonne glottale. Et qui se prononce d'un gros « coup de glotte »

Comme ça : ggllkk !

Oh oui, je me réjouis !

Pascal

2 décembre 2021